La transition énergétique …pas que pour la classe aisée…

Il y a quelques années, un débat a été tenu au parlement allemand à propos des tarifs de l’électricité augmentant. Il faut savoir que le kWh en Allemagne est payé à plus de 30ct/kWh, ce qui pèse lourd sur le portemonnaie des citoyens moyens.

Une grande partie de l’augmentation a été provoquée par l’augmentation des taxes pour la promotion du renouvelable (Erneubare Energie Gesetz (EEG) Umlage) qui a suivi le succès du programme d’encouragement.

Des voix se sont levées contre le fait que la majorité des citoyens vivant dans les villes et les immeubles, et n’étant pas propriétaires, n’avaient donc pas l’occasion de profiter des subventions pour l’installation de panneaux solaire sur leur toit. Au final ce sont les moins riches dans les HLM qui subventionnent des installations sur le toit des villas des plus aisés, lesquels augmentent la valeur de leur bien et font du retour sur investissement garanti par l’état.

Si le débat est légitime d’un point de vue social, il ne fait pas beaucoup avancer la transition.


Cette introduction n’a pas pour but de se positionner sur ce sujet mais juste d’attirer l’attention sur un fait que pour installer des panneaux sur son toit, et bien …il faut avoir son propre toit.

Plus de 60% de la population suisse est locataire. Et près des trois quart de la population habite dans des immeubles (statistique OFS). Pour la grande majorité des citoyens, installer son propre solaire sur son toit est donc impossible. L’image très marketing de la villa à énergie positive avec un beau toit PV qui brille sous le soleil, concerne la minorité des citoyens Suisses (…et cela sans encore y ajouter les photos de la petite famille tous beaux et incroyablement heureux devant leur véhicule électrique à la carrosserie parfaite… bien sûr tous les Suisses sont comme ça non? ).

Une démocratisation de l’utilisation du solaire en autoconsommation dans les ménages passe donc nécessairement par les immeubles. Mais qu’est-ce qui est possible aujourd’hui? Cela se résume en 3 lettres si on veut couvrir la majorité des cas: RCP, le Regroupement pour la Consommation Propre.

Un RCP est une entité légale qui regroupe les différents consommateurs situés au même endroit et qui peuvent gérer leur énergie électrique en commun. Ils se présentent comme un seul consommateur vis à vis du distributeur d’électricité. Pour être créée, il est nécessaire d’avoir au moins l’équivalent de 10% de la puissance de raccordement au réseau avec du photovoltaïque. La répartition entre les membres du regroupement à l’interne doit être correcte et est encadrée par la loi pour garantir une équité entre tout le monde et protéger les locataires. Ce comptage et répartition peut être réalisé par le distributeur habituel qui a, en général, mis en place les services qu’il faut ces dernières années, mais aussi par d’autres prestataires. En effet, le comptage dans ces cas est soumis à des règles à suivre mais est libéralisé.

Depuis les changement légaux, d’abord avec les communautés d’autoconsommation (CA), puis avec les RCP, il est donc possible de mettre du PV sur les immeubles et fournir les différentes personnes/entreprises y résidant en autoconsommation. Reste à motiver la démarche, en effet pourquoi un propriétaire d’un appartement de rendement mis en location dans un immeuble des investirait? C’est son locataire qui paye l’électricité de toute manière! Et moins il en entend parler, mieux il se porte…

Pour convaincre le maximum de personnes, il n’y a probablement qu’un mot: la rentabilité. En effet le prix du solaire PV a énormément baissé (voir article: prix du PV en Suisse). Il est possible d’avoir de l’électricité moins chère qu’au réseau électrique en la produisant soit même. Avec la mise ensemble des appartements de l’immeuble et des communs, il est probable que le taux d’autoconsommation soit intéressant. Pour un propriétaire habitant dans son appartement, l’avantage est immédiat. Si un appartement est en location, il y a un intérêt financier tout de même: le RCP est autorisé à refacturer avec un certain gain l’énergie à l’interne. Ce gain est limité par la loi pour des raisons de protections des locataires. Il est fixé au taux d’intérêt de référence plus 0.5% de risque.

Illustration du « Guide pour la consommation propre »:

Les calculs doivent se faire au cas par cas, mais il est possible que les propriétaires puissent rembourser leur investissement et réaliser un intérêt. Les habitants payent moins cher l’électricité, tout le monde y gagne, y compris la transition énergétique.

En conclusion de ce court article, il existe donc des possibilités pour que la majorités des citoyens habitant dans des immeubles puissent avoir accès à l’autoconsommation. A ce stade il est important d’informer: les membres des PPE, les gérances et les fonds de placements. Si la pratique devient systématique pour de nouvelles constructions, l’idée de l’autoconsommation doit encore faire son chemin sur les immeubles bâtis.


Notes diverses

Pour les détails sur la mise en place d’un RCP, c’est ici:

Notez que c’est bien d’autoconsommation et pas d’approvisionnement dont on parle ici: il y a d’autres possibilités pour soutenir le développement du solaire quand on est locataire, comme de souscrire à un abonnement avec du courant solaire proposé par le distributeur. Il est aussi possible d’investir dans des coopératives solaires, et de réaliser des financements participatifs (dans ce cas plusieurs individus investissent dans une centrale mais ne font pas de la consommation propre. Ils vont recevoir les dividendes de leur investissement mais ne vont pas consommer de l’électricité auto-produite)

Mais comme cet article est écrit pour le site informatif autoconsommation.ch, j’en reste au cas où la production et la consommation sont sur le même lieux.